Installation et Foncier Agricole

Le nombre de paysan.nes diminue chaque année et a été divisé par deux en trente ans. Au 1er janvier 2023, le nombre d’actifs non-salariés agricoles s’élève à 442 100 personnes (source chiffres utiles – MSA – édition 2024).
Chaque année depuis 2015, environ 22 000 chefs d’exploitation cessent leur activité tandis que 15 000 nouveaux s’installent. En 2023, 53 % des chefs d’exploitation ont plus de 50 ans. Selon l’INSEE et Agreste (le service statistique du ministère de l’Agriculture), la France pourrait passer en 2035, à 274 600 exploitations agricoles, soit une baisse de 30 % des fermes par rapport à 2020. Philippe MAUGUIN, président de l’INRAE, a indiqué que la moitié des 390 000 fermes seraient à céder dans les dix ans. Pour arriver à une installation pour un départ, il en faudrait 7 000 de plus.
L’installation de nouveaux paysans est urgente puisque 100 000 exploitations ont encore disparu entre 2010 et 2020. Les candidats à l’installation ne manquent pas mais se heurtent à des obstacles trop nombreux : faible rémunération, difficultés d’accès à la terre, surcharge administrative …
S’agissant des aides à l’installation, deux tiers des nouveaux installés n’en bénéficient pas car ils n’y sont pas éligibles ou parce qu’ils y renoncent. Plus de la moitié des personnes qui s’informent sur le métier d’agriculteur se déclarent non issus du milieu agricole (NIMA). Les aspirations de ces nouveaux installés hors cadre familial sont différentes de celles de leurs ainés (retour à la ruralité pour les urbains, sensibilités écologiques…). Une fois installés, leurs pratiques varient également (plus de diversification et le projet agricole n’est pas toujours envisagé à l’échelle d’une vie mais parfois pour quelques années seulement).
Le projet du MODEF nécessite de remplacer chaque départ en retraite par une installation, pour atteindre un million de paysan.nes en 2030.
• Une politique d’aide au revenu durant les cinq premières années suivant l’installation avec un minimum de 1500 € par mois,
• Le retour des prêts bonifiés à l’installation,
• La mise en place d’un prêt à taux zéro ou négatif, plafonné à 50 000 €, pour tout projet d’installation,
• L’installation progressive avec le système de location-vente des terres aux jeunes,
• Une exonération totale des cotisations sociales pendant 5 ans et également pour les jeunes s’installant sans DJA,
• La notion d’installation est plurielle. L’accès au métier d’agriculteur doit être réellement ouvert à tout le monde (jeunes, nouveaux installés, hors cadre familial …),
• La création d’un fond de cautionnement financé par l’état, les banques et l’agroalimentaire (proposition lors du 10e congrès du MODEF)
• Une exonération du patrimoine à hauteur de 100 000 € pour favoriser la transmission hors cadre familial,
• Une aide à la transmission des exploitations de 50 000 € à destination des chefs d’exploitations en fin de carrière.
Une vraie politique foncière favorisant des fermes à taille humaine
En 30 ans, la taille moyenne des fermes a doublé, avec un nombre d’emplois en chute libre. Leur surface moyenne est désormais de 69 hectares en métropole soit 14 ha de plus qu’en 2010 et 5 hectares dans les départements Outre-Mer.
L’Agriculture française évolue vers un modèle de firmes, où seules les exploitations les plus capitalisées peuvent survivre. Cette dynamique creuse les inégalités au sein de la profession agricole. Les personnes disposant des plus gros revenus sont en position de force sur les divers marchés fonciers.
En haut de l’échelle, 10 % des paysan.nes dépassent les 150 000 euros de revenus annuels et à l’autre bout 10 % se situent à moins de 15 000 euros. Ces méga-fermes sont tournés vers l’agro-industrie et l’exportation. L’industrialisation de l’agriculture et la spécialisation des fermes ont des effets dévastateurs sur la Terre et sur l’environnement.
En 2020, 14 % des surfaces sont exploitées par des Sociétés Civiles d’Exploitation Agricole (SCEA) ou autres sociétés dont le capital peut être financé par des capitaux non agricoles et des personnes morales. D’après Laurent PIET (INRAE), en 2020, le tiers des SCEA et autres sociétés anonymes (SA) était contrôlé par des personnes non agricoles.

Cette concentration foncière met en évidence deux modèles d’agriculture bien opposés :
• le modèle de l’Agriculture familiale prôné par le MODEF, où les paysan.nes contrôlent le capital de l’unité de production (qu’elle soit individuelle ou sociétaire), où l’objectif est de maximiser le revenu du travail et de préserver durablement le potentiel productif,
• le modèle de l’Agriculture de firme, vers lequel l’Agriculture française s’oriente lentement mais sûrement, où la logique économique est de maximiser le retour sur l’investissement financier et de diminuer les coûts de production au détriment du climat, de la biodiversité, des sols, de l’eau, de l’air …

D’autres menaces planent sur les terres agricoles et sur notre potentiel nourricier. Des usages non alimentaires des terres agricoles concurrencent leur vocation nourricière : production de biocarburants, de fibres textiles, de plantes pour des usages industriels … 8 % de la SAU est déjà dédiée à des productions agricoles non alimentaires.
Laisser les lois du marché privilégier les usages les plus rentables des terres serait irresponsable.
Aujourd’hui plus encore qu’hier, l’accès au foncier des petits et moyens paysan.nes et des jeunes est de plus en difficile. En effet, le financement est réservé aux gros agriculteurs et les lois régissant les structures agricoles privilégient les grands agriculteurs.
Les SAFER sont des agences immobilières et surtout le revenu des paysan.nes familiaux est à un tel niveau qu’il est de plus en plus difficile de faire face aux annuités ou fermages des terres.
- Doter les SAFER de moyens juridiques et financiers en bannissant leur rôle d’agent immobilier,
- Pour qu’elles retrouvent une indépendance et puissent assurer leur mission « pour le bien commun », les SAFER doivent avoir les financements suffisants pour stocker des terres en vue d’une rétrocession à un jeune,
- Le MODEF revendique 25 milliards d’euros de fond de dotations nationales à la SAFER financés notamment par la Banque des Territoires. Ce montant correspond à la valeur des terres aujourd’hui exploitées par des paysans qui seront retraités en 2030 (rapport de la commission d’enquête du Projet de Loi d’Orientation Agricole 2024),
- Le contrôle des structures doit être déclenché dès le premier hectare mis en vente.
- Revoir le Schéma Directeur Régional des Exploitations Agricoles (SDREA) en priorisant l’emploi, la création de valeur ajoutée et l’Agriculture Biologique,
- Le statut du fermage est une garantie pour le paysan et doit être défendu,
- Créer un fond de garantie des fermages (proposition du MODEF de la Corrèze) : mettre en place un fond public de garantie de fermages pour faciliter la conclusion des baux, voir garantir un paiement en cas de difficultés du paysan.ne,
- Créer des prêts fonciers agricoles à 1 % pour installer des jeunes paysan.nes ou des nouveaux installés,
- Interdire la vente et la location de Droit de Paiement de Base (DPB) : initialement, les paysan.nes ont accédé à ces droits de manière gratuite. Néanmoins, lors de la transmission de ces droits, certains paysan.nes vendent ces droits, ce qui leur permet de survaloriser leurs terres,
- La fin de l’artificialisation des terres agricoles.