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En 2024 des mouvements d’agriculteurs d’une ampleur inédite ont bouleversé la France. Ces mouvements sont portés au départ par des agriculteurs pris dans l’engrenage de la surproduction agro-alimentaire et des systèmes spéculatifs de marchés. Ils sont excédés et il en ressort deux revendications principales : la première porte sur l’adaptation au changement climatique que nous prenons tous de plein fouet car nous sommes en première ligne au contact de la nature. La deuxième revendication est le revenu. Cela fait 60 ans que le MODEF propose d’imposer des prix planchers sur les produits agricoles. Mais cela, le gouvernement n’en veut pas car les grandes firmes multinationales de l’agro-alimentaire n’en veulent pas. Le MODEF revendique la sortie des produits de base de l’alimentation humaine de la spéculation des marchés.

Depuis quelques années les paysans sont assignés à différentes responsabilités : nourrir l’humanité, aménager l’espace rural, protéger le bien-être animal, éviter de polluer et j’en passe … Mais au fond quand on demande à un agriculteur son avis sur sa condition, en général il répond qu’il appartient à un lieu, qu’il a un savoir-faire et qu’il souhaite, sur ce lieu et avec ses pratiques, gagner correctement sa vie. C’est exactement la définition de ce que l’on appelle un terroir.

Il faut arrêter de considérer l’idée de terroir comme quelque chose de folklorique. Notre réalité est beaucoup plus précise et débouche sur notre conception de l’identité paysanne qui passe par du vécu sur notre terre, des pratiques qui nous viennent du fonds des âges mais que nous avons su adapter à l’évolution des techniques modernes. Et du fruit de ce travail nous en attendons tous une juste rémunération.

L’agriculture industrielle a pillé nos ressources naturelles, a pillé notre pouvoir d’achat, a pillé les garanties de notre santé humaine et a pillé notre revenu, à nous les agriculteurs. Plutôt que des primes ou des budgets de circonstances pour calmer la colère des paysans, nous voulons des prix, des prix rémunérateurs pour les paysans.

La société va continuer à introduire des normes environnementales et sociales à la hauteur des défis du réchauffement climatique, de la chute de la biodiversité et du renouvellement des générations d’agriculteurs. Mais ce ne sera acceptable qu’à la condition d’une révision en profondeur de la politique agricole actuelle au profit de notre revenu. Il faut arrêter de privilégier les volumes et les hectares au détriment de la qualité sanitaire, environnementale et sociale de nos productions.

Frédéric MAZER